Qu’est-ce que les ressources halieutiques ?

Les ressources halieutiques ne peuvent pas être comparées à une ressource fossile comme le pétrole. Elles possèdent des attributs qui font leur force, mais aussi leur faiblesse.

Les rapports scientifiques sur l’état des mers, des océans, comme des fonds marins, sont aussi nombreux qu'unanimes sur le constat suivant : les ressources halieutiques se font rares, qu’elles concernent les poissons, les algues, les coraux ou autres crustacés. Cette rareté est autant la conséquence d’une surpêche que celle de la pollution de l’eau par le plastique et autres produits chimiques. À cela, s'ajoutent bien entendu les conséquences du dérèglement climatique qui réchauffe les mers et chamboule les écosystèmes.

Comme dans tout écosystème sain, les espèces vivantes se renouvellent de génération en génération. Le vivant aquatique ne fait pas exception et toutes les ressources halieutiques sont donc renouvelables, en théorie. Parce que la pêche agit comme un agent extérieur qui augmente la mortalité des populations, les états ont mis en place le Rendement Maximal Durable ou RMD. Ce RMD illustre la limite au-delà de laquelle les espèces pêchées ne seraient plus pérennes. Or, ce RMD varie grandement en fonction des espèces et des stocks.

Une sardine a ainsi un haut taux de reproduction et une vie assez courte. Son RMD sera donc élevé et une grande quantité de ces poissons pourra être pêchée. D’un autre côté, un requin, lui, ne se reproduit pas beaucoup et sa durée de vie est longue. Son RMD sera donc plus bas, afin de pérenniser l’espèce dans le temps. Même si elles sont renouvelables, les ressources halieutiques ne sont pourtant pas forcément à égalité quant aux chances de survie des différentes espèces face à leur exploitation. C’est d'ailleurs l’un des facteurs qui les fragilise.

À ce titre, l’écart entre les mailles du filet d’un chalutier est primordial. Plus il sera grand, plus les petits poissons, et donc les jeunes spécimens, seront épargnés.

À la différence des vaches qui peuvent être numérotées afin de déterminer leur propriétaire, les poissons (ou autres ressources halieutiques) n'appartiennent à personne tant qu’ils nagent. La ressource n’est possédée qu'une fois pêchée. Cette mise en commun de facto des ressources halieutiques entraîne ce que les chercheurs et les spécialistes appellent “la course aux poissons”.

Le principe est extrêmement simple. Devant la mise en commun de la ressource, c’est l'effort de travail qui détermine qui aura le plus de poissons. Or, plus un pêcheur capture de poissons, plus il appauvrit la ressource commune et donc diminue la production d’autres espèces semblables. Face à cette rareté, les pêcheurs vont donc travailler plus afin de rapporter plus de poissons, ce qui va nécessairement entraîner une raréfaction de l’espèce dans l’espace de pêche. La rareté des ressources halieutiques couplée à la course aux poissons entraîne donc de la surpêche et ainsi accélère le cercle vicieux qui tue la vie maritime à petit feu. Les quotas de pêche comme les RMD sont donc là pour empêcher cette course aux poissons et permettre à ces ressources halieutiques d’être réellement renouvelables.

Avec cette course aux poissons et des quotas qui peuvent varier en fonction des pays, les tensions entre pêcheurs ne sont pas rares. Cela a notamment été le cas en Bretagne où un conflit a opposé des pêcheurs français à des pêcheurs britanniques concernant la coquille Saint Jacques. Dans un souci de préservation de l'espèce, la France a légiféré pour ne pas la pêcher pendant sa période de reproduction qui dure près de 6 mois. Les Britanniques, eux, n’ont pas cette obligation et vont donc, pendant ces 6 mois, continuer à pêcher la coquille dans les eaux communautaires, ce qui amoindrit la population et lèse les pêcheurs français, qui, eux, ne peuvent pas pêcher durant cette période. Ces tensions prennent part dans un contexte mondial d’augmentation permanente de l’exploitation des ressources halieutiques, ce qui n'arrange pas vraiment les choses. ⚓

Le vivant aquatique faisait déjà vivre 300 millions de personnes de manière directe ou indirecte en 2005 selon l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture. Un chiffre qui s’explique par la consommation de ressources halieutiques. Depuis les années 1960, la consommation de ressources halieutiques a doublé. Plus encore, elle augmente de 3% par an de manière continue. En 2020, la production d'animaux aquatiques était estimée à 178 millions de tonnes. Rien que ça.

La production halieutique, comme la pêche en haute-mer, reste le principal moyen pour prédire des ressources halieutiques. La pêche de capture par exemple, représente 90 millions de tonnes sur ces 178 millions de tonnes. À cela, on peut ajouter quelques tonnes d’algues sauvages.

L’aquaculture compte pour près de la moitié (49%) dans la production d’animaux aquatiques avec 88 millions de tonnes produits en 2020. Si l’on ajoute 97% des 36 millions de tonnes d’algues développées en mariculture, on peut aisément comprendre que l'aquaculture est désormais le premier moyen de production des ressources halieutiques. 

Plus encore, sur les 157 millions de tonnes d’animaux produits, plus de 20 millions étaient destinés à fabriquer de la farine de poisson ou de l’huile de poisson, un élément essentiel pour…les fermes aquacoles, grandes consommatrices de ces aliments transformés pour nourrir les poissons d‘élevage. La boucle est bouclée.

En permettant de diminuer la surpêche et en offrant une production stable, l’aquaculture semble plus responsable vis-à-vis des animaux marins. Pourtant, ce moyen de production peut aussi être néfaste pour l'écosystème marin. Les maladies comme les médicaments qui circulent parmi les élevages se propagent dans la mer, provoquant des détériorations du milieu aquatique. Les déchets concentrés des poissons, comme les produits chimiques, sont en contact direct avec l’eau des mers et des océans, accentuant cette pollution. L'installation même de ces fermes peut aussi causer des dommages comme en Asie du Sud-est où la mangrove a peu à peu été grignotée par des fermes d'élevages de crevettes.

Si l’aquaculture apparaît comme une solution viable, c’est un moyen de production qui peut encore largement se perfectionner.

Les ressources halieutiques sont aussi rares que précieuses pour la planète et nos papilles. Renouvelables, elles peuvent pourtant permettre à des milliards de personnes de se nourrir grâce à la caractéristique de “bien commun” de cette richesse, qui appartient à tous avant d'être sortie de l’eau. Pourtant, pour que ces ressources essentielles restent viables pour de très nombreuses années, unchangement de cap dans la production et une diminution de la consommation des produits de la mer semblent être inévitable, même pour le régime pescetarien, l’un des nombreux régimes sans viande qui existe. Tant pis pour nos sushis ou nos brandades, et tant mieux pour la planète ! 🍣