Dans un rapport publié en septembre 2019, des experts français, rassemblés au sein de la plateforme Climari-France (qui réunit notamment des équipes du CEA, du CNRS et de Météo-France), ont présenté leurs différents scénarios concernant le réchauffement climatique.
24 novembre 2020
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L’un de ces scénarios, la plus pessimiste, envisage une montée du thermomètre en moyenne de 6,5 C à 7°C d’ici la fin du siècle.
Ce cas de figure, qui n’est pas forcément le plus probable, intègre une forte croissance économique basée sur les énergies fossiles. Il s’agit là d’un pavé dans la mare, car les précédents modèles imaginaient déjà en 2012 un scénario pessimiste, mais il se limitait à moins de 6° de hausse.
Leurs calculs ont de quoi surprendre, parce qu’un tel phénomène n’aurait jamais été observé auparavant. Selon les spécialistes, la dernière déglaciation avait vu un gain de température de 3 à 4° à l’échelle globale, à savoir sur 10.000 ans, soit un changement mineur sur un siècle.
Si on regarde encore dans le rétroviseur, on sait que le gain de température a été de 1°C par rapport à l’ère préindustrielle. Ce phénomène, d’apparence modeste, a pourtant suffi à provoquer des catastrophes naturelles en chaine selon les zones du globe (inondations, sécheresses, etc).
En quoi ces prévisions sont-elles plus fiables que les précédentes ?
Les modèles développés récemment simulent mieux le fonctionnement réel du climat comme l’impact du CO₂et de l’humidité. On apprend en marchant : les modèles français ont beaucoup progressé quant à leur capacité à représenter les caractéristiques observées du climat actuel, comme les structures spatiales des températures, des nuages, des précipitations, des vents, des courants marins, de la glace de mer, de la salinité, etc.
Ils avancent l’hypothèse d’une « réaction plus forte du climat à l’augmentation des gaz à effet de serre (GES) anthropique que dans les simulations de 2012 ». Derrière ce terme barbare, ces émissions de GES de sources anthropiques proviennent en fait des activités humaines, comme la combustion des énergies fossiles et les procédés industriels. Sont en cause nos modes de transport, le chauffage, la climatisation, etc.
Les projections ont aussi été affinées par grandes zones. Toutes les parties du globe ne vont pas subir les mêmes effets :
À ce rythme, la banquise, qui est l’une des icones du réchauffement avec l’ours blanc, devrait disparaître en fin d’été dès 2080.
En France, la Garonne pourrait être à sec plusieurs mois par an à partir de 2070. Dans le même temps, les feux de forêt ravageront des régions jusque-là relativement épargnées. Et, les agriculteurs français devront réinventer la roue.
À court terme, les dés sont jetés.
Selon le rapport de 2019 des experts français, la planète s’achemine vers un gain de 2°C à horizon 2040. Cette progression, qui serait continue, est irréversible, en raison de l’inertie du système climatique.
Néanmoins, rien ne sert de pousser des cris d’orfraie. Il reste une certaine marge de manœuvre pour infléchir la courbe des températures d’ici 2100. Ainsi, les scientifiques ne cachent pas que la température moyenne qui règnera sur la planète à la fin du siècle dépend fortement des politiques publiques, qui seront mises en œuvre dès maintenant et au cours des prochaines décennies. Leur leitmotiv, c’est que le plus tôt sera le mieux.
À ce titre, ils n’excluent pas un réchauffement limité à 2°C, voire moins, à la fin du siècle, à condition de prendre le problème à bras le corps. Pour cela, iI faudrait atteindre la neutralité carbone vers 2060. Cette neutralité carbone correspond à un point d’équilibre, qui implique qu’un pays n’émette pas plus de gaz à effet de serre qu’il est capable d’en capter et stocker.
D’autres chercheurs vont dans le même sens. Il existe une vingtaine de centres de recherche, aux Etats-Unis, en Europe, en Chine et au Japon qui ont mis en œuvre des centaines de modélisations du climat, à l’aide de supercalculateurs. Ils ne cessent d’échanger entre eux.
Tous leurs travaux seront synthétisés et médiatisés par le Groupe d’Experts intergouvernemental sur l’évolution du climat, le fameux GIEC, dont le sixième rapport d’évaluation est prévu en 2022.
Depuis ce rapport, qui date de septembre 2019, certains pays ont pris des engagements forts.
Il faut se féliciter que la Chine ait officiellement, le 22 septembre dernier, déclaré viser la neutralité carbone à horizon 2060. Il s’agit d’une belle prise pour les climatologues, car le géant asiatique est à l’origine d’un quart des émissions mondiales de gaz à effet de serre.
L’Empire du Milieu, dont la consommation d’électricité provient toujours à plus de 57 % du charbon, n’a cependant pas précisé comment elle compte y parvenir. La Chine est un pays où le rôle des politiques publiques est déterminant. Certains considèrent que si la Chine s’engage dans cette voie, avec la même énergie avec laquelle elle a bloqué le Covid, elle a des chances d’y parvenir.
Plus récemment, Yoshihide Suga, Premier Ministre japonais, a indiqué mettre son pays sur une nouvelle trajectoire, à savoir la neutralité carbone en 2050. Il s’agit là d’un renforcement de ses engagements. Jusque-là, l’échéance envisagée était plus floue, et quand c’est flou, il y a un loup. En effet, il avait prévu d’y parvenir plutôt aux alentours de la deuxième moitié du XXIe siècle. Après nous le déluge. Troisième économie mondiale, le pays du Soleil Levant, est régulièrement frappé par des catastrophes naturelles.
Ces deux annonces s’inscrivent dans la lignée d’accords plus anciens. En 2015, à l’occasion de l’accord de Paris sur le climat, les 196 Etats signataires avaient soumis leurs contributions déterminées (NDC en anglais, nationally determined contributions). Autrement dit, leur feuille de route pour réduire leurs émissions de gaz à effet de serre, secteur par secteur, d’ici à 2030.
De plus, afin de ne pas perdre de vue des brebis égarées en cours de route, il était aussi prévu que ces premières contributions soient complétées par de nouvelles ambitions dans les années suivantes.
C’est pourquoi l’UE planche actuellement sur ses nouvelles contributions déterminées. Ursula von der Leyen, présidente de la Commission européenne, qui a fait des études scientifiques, n’a pas froid aux yeux. Elle a proposé mi-septembre de porter de 40 à 55% l’objectif européen de réduction des GES pour 2030. Une décision est attendue en décembre pour savoir si son vœu a été entendu.
Chez Ekwateur, on espère en tout cas que ce vœu sera exaucé. En attendant vous pouvez tous-tes participer à la baisse de ces émissions de CO₂ en optant pour de l’électricité verte ou du gaz renouvelable. On vous attend 😉.