
Aller au ski, est-ce écologique ?
Le manteau blanc, les descentes endiablées, les fondues en altitude… Le ski, c’est le rêve hivernal par excellence. Seulement, derrière cette carte postale se cache une réalité bien moins féerique : l’impact écologique de ce sport est colossal ! Entre les trajets en voiture ou en avion, l’artificialisation des pistes et l’eau engloutie pour fabriquer de la neige, une simple journée de ski peut peser lourd sur le bilan carbone. Alors, faut-il ranger ses skis au placard ? On fait le point.
14 mars 2025 à 12:15
Lecture 7 mn
Quid de l'empreinte carbone du ski
Le ski, ça en fait rêver plus d’un·e. Seulement, ç'a a aussi un impact environnemental XXL. Selon une étude du cabinet Utopies, une seule journée de ski peut générer en moyenne 48,9 kg de CO₂ par skieur·se¹. Bon, dit comme ça, on imagine que ça ne vous parle pas. Pour vous faire une idée, c’est à peu près l’émission d’un trajet en voiture de 250 km en essence ou diesel (un peu plus qu’un Paris / Caen, grosso modo).
D’abord, le transport est le principal facteur de pollution. Il représente environ 52 % des émissions totales liées à la pratique du ski. En effet, la majorité des vacancier·e·s rejoignent les stations en voiture, parfois sur de longues distances, ce qui alourdit considérablement leur empreinte carbone. Comme vous vous en doutez, l’utilisation de l’avion pour accéder aux stations les plus éloignées est encore plus impactante.
Le saviez-vous ?
La France est l’un des pays d’Europe qui possède le plus grand nombre de stations de ski.
Ensuite, les infrastructures et les aménagements des stations de ski participent à hauteur de 17 % des émissions totales. Les remontées mécaniques, les dameuses et surtout l’enneigement artificiel, très énergivore, pèsent sur le bilan environnemental du ski. En moyenne, produire un hectare de neige artificielle peut consommer 4 000 m³ d’eau et nécessite une quantité importante d’électricité. Aujourd'hui, sur l’Hexagone, on estime que la fabrication de neige artificielle mobilise pas moins de 10 à 15 millions de m³ d'eau par an² !
Enfin, l’équipement des skieur·se·s n’est pas à négliger. Eh oui, skier en petite tenue, c’est généralement une très mauvaise idée. Alors, entre la fabrication des skis, des vêtements techniques et des accessoires (casques, masques, gants...), le matériel de ski est responsable de 16 % des émissions d’une journée sur les pistes. Sa production implique des matériaux gourmands en ressources (plastiques, aluminium, fibres synthétiques, etc.), tandis que son renouvellement fréquent alourdit encore davantage l’impact écologique de ce sport¹.
En somme, avant d’enfiler vos skis, souvenez-vous que l’impact environnemental de cette activité hivernale est loin (très loin) d’être anecdotique ! En effet, le ski, c’est 800 000 tonnes de CO2 par an³… Plutôt costaud, n’est-ce pas ?
Adoucir le bilan carbone du ski : c’est possible ?
Pour les féru·e·s de ski, il peut être difficile d’envisager de s’en passer complètement, malgré un bilan carbone XXL… Toutefois, souvenez-vous que certaines pratiques permettent de rendre le ski un tantinet plus respectueux de l’environnement.
La première clé pour limiter son impact est de bien choisir son mode de transport. Plutôt que la voiture individuelle, qui représente plus de la moitié des émissions liées à cette activité, le train est une alternative nettement plus vertueuse. Certaines stations, comme Les Arcs ou Saint-Gervais, sont directement accessibles en train. Résultat : vous réduisez radicalement l’empreinte carbone du trajet. Pour les skieur·se·s venant de plus loin, le covoiturage reste une solution intermédiaire plus responsable. Eh oui, vous êtes loin d’être seul·e à vouloir vous faire une petite piste rouge, alors n’hésitez pas à chercher des covoitureur·se·s pour le grand départ.
Une autre approche consiste à choisir des stations engagées dans une démarche durable. Certaines stations françaises ont obtenu le label « Flocon Vert », qui garantit des actions concrètes en faveur de l’environnement. Ces stations s’engagent notamment à réduire leur consommation énergétique, à préserver la biodiversité locale et à proposer des alternatives à l’enneigement artificiel, comme la diversification des activités hors ski. Parmi elles, on retrouve par exemple Chamonix, La Clusaz ou encore Valberg.
Le choix du matériel joue également un rôle important. L’achat de skis et d’équipements neufs représente une part significative de l’empreinte carbone d’un·e skieur·se. Pourtant, de nombreuses alternatives existent : louer son matériel plutôt que de l’acheter permet d’alléger son impact, et aussi de s’adapter aux conditions de neige et à son niveau. Pour celles et ceux qui tiennent à leur propre équipement, certaines marques commencent à proposer des skis éco-conçus, fabriqués avec des matériaux plus respectueux de l’environnement.
Une fois en station, adopter des gestes écoresponsables peut aussi faire la différence. Limiter sa consommation d’eau et d’électricité dans son logement, privilégier les restaurants proposant des produits locaux et une alimentation moins carnée (on vous promet, la tartiflette végé, c’est au top : des bons champignons remplacent à merveille les lardons !) : autant de réflexes à adopter hiver comme été.
Si le ski peut devenir une activité plus respectueuse de l’environnement, elle reste néanmoins coûteuse en énergie et très émettrice de CO₂. En choisissant un mode de transport moins polluant, en favorisant des stations responsables et en optimisant l’utilisation de son matériel, il est tout de même possible de concilier plaisir de la glisse et respect de la planète.
Ski : au-delà de l'impact carbone, quelles sont les autres conséquences sur l'environnement ?
Sport emblématique des vacances d’hiver, le ski alpin rime donc avec « bilan carbone » XXL. Ce n’est pas tout, puisque son impact environnemental est loin d’être anodin sur bien d’autres points. Entre la transformation des paysages, la consommation d’énergie et d’eau pour produire de la neige artificielle, et les répercussions sur la biodiversité, la glisse a un prix écologique qu’il est difficile d’ignorer.
L’impact sur la biodiversité et les écosystèmes : des montagnes sous pression
Les montagnes sont des écosystèmes fragiles, où la faune et la flore ont dû s’adapter à des conditions extrêmes. Cependant, avec l’expansion des stations de ski et l’aménagement massif des domaines, cet équilibre est de plus en plus perturbé.
Chaque année, de nouvelles pistes sont tracées, et ça, ça rime avec déforestation de zones entières, modification du relief, et construction d’infrastructures lourdes comme les remontées mécaniques et les canons à neige. Résultat ? Une destruction des habitats naturels des espèces alpines comme le tétras-lyre, le chamois ou encore la marmotte⁴.
Les nuisances ne s’arrêtent pas là. En hiver, les stations restent animées jour et nuit, avec des milliers de visiteur·se·s, du bruit, de l’éclairage artificiel et des activités qui perturbent encore davantage la faune sauvage. Le passage incessant des skieur·se·s hors-piste, notamment, peut causer un stress important aux animaux en pleine période de survie hivernale.
Enfin, les cours d’eau ne sont pas épargnés. Le bétonnage des pentes et des vallées perturbe le cycle naturel de l’eau et peut entraîner une modification du débit des rivières, avec un impact direct sur la qualité des écosystèmes aquatiques⁵.
L’artificialisation des sols : quand la montagne devient un terrain de jeu bétonné
Impossible de passer à côté : le développement des stations de ski a transformé le paysage montagneux. Chalets, hôtels, routes, parkings, remontées mécaniques… En bref, l’urbanisation galopante des sites touristiques a entraîné une artificialisation massive des sols, avec des conséquences importantes sur l’environnement.
En premier lieu, la destruction des espaces naturels pour construire des infrastructures réduit la capacité des sols à absorber l’eau. En montagne, c’est synonyme d’une augmentation des risques d’érosion, de glissements de terrain et de crues soudaines. Lors des fortes pluies ou de la fonte des neiges, l’eau ruisselle plus vite et plus violemment, avec des impacts négatifs en aval.
D’un point de vue climatique, l’artificialisation des sols contribue aussi à accélérer le réchauffement local. Les surfaces en béton et en asphalte stockent la chaleur, modifient les microclimats et perturbent ainsi les conditions naturelles qui permettent normalement la formation et la conservation de la neige.
Sans oublier l’impact sur la pollution de l’air. En période de forte affluence, certaines stations peuvent se transformer en véritables embouteillages à ciel ouvert. Les voitures, camions et dameuses tournent à plein régime, rejetant des tonnes de CO₂ et de particules fines dans l’air. Ça donne envie 😭 !
Et la neige artificielle, ça donne quoi ?
Avec le changement climatique, forcément, la neige naturelle se fait de plus en plus rare. Et du ski sans neige, ça pose un léger problème de cohérence. Alors, pour pallier ce problème et garantir l’ouverture des pistes, les stations misent de plus en plus sur la neige artificielle, produite grâce à des canons à neige. Aujourd’hui, près de 40 % des pistes françaises en sont équipées⁶ !
Le hic ? Cette neige 100 % industrielle a un coût environnemental considérable. Pour fonctionner, les canons à neige mobilisent d’énormes quantités d’eau et d’énergie. Il faut en moyenne 4 000 m³ d’eau pour enneiger un hectare de piste, soit l’équivalent de trois piscines olympiques⁷ ! Une ressource qui est directement prélevée dans les nappes phréatiques ou les rivières, ce qui participe à accentuer le stress hydrique dans des régions déjà fragilisées par la sécheresse.
Le saviez-vous ?
En 2015, les communes supports de stations de ski étaient à l’origine de 17 % des prélèvements d’eau douce de montagne destinés à l’AEP, alors que seule 10 % de la population vivant en zone de montagne réside dans ces territoires⁸.
Côté énergie, les chiffres sont tout aussi préoccupants. Selon l’Ademe, l’électricité consommée pour produire la neige artificielle représente entre 25 et 30 % de la consommation énergétique totale des stations de ski⁹. Une dépense énergétique qui alourdit encore davantage leur bilan carbone.
Enfin, contrairement à la neige naturelle, la neige artificielle est plus compacte et plus dense, ce qui modifie le cycle de fonte et l’équilibre des sols. À long terme, elle peut perturber la croissance des plantes alpines, qui ont besoin d’un certain temps pour se régénérer après l’hiver.
Est-ce que le ski écologique, ça existe ?
Pour la faire courte, la réponse est non ! Là encore, vous pouvez toutefois essayer de faire mieux… En plus de privilégier le train plutôt que la voiture, de choisir des stations engagées et d’entretenir et louer votre matériel plutôt que d’acheter neuf, vous pouvez également penser à consommer local en station. Privilégier les produits locaux et de saison dans les restaurants d’altitude réduit l’empreinte carbone des repas. Certaines stations développent d’ailleurs des circuits courts pour l’approvisionnement.
Enfin, il vous reste à penser à explorer d’autres façons de profiter de la montagne.
Le ski alpin n’est pas la seule option ! Pour les amoureux·ses de la nature, il existe des alternatives comme le ski de randonnée, la raquette ou encore le ski nordique, bien moins gourmandes en énergie.
Si des progrès sont faits pour réduire l’empreinte carbone du ski, le modèle actuel reste encore largement perfectible. Les stations de ski sont confrontées à un dilemme : continuer à attirer les touristes tout en limitant leur impact environnemental. Pour y parvenir, elles devront sans doute diversifier leurs offres en s’éloignant d’un modèle 100 % ski alpin et en intégrant davantage d’activités douces.
L'exemple de la station Metabief
Contrairement à celles qui ferment les yeux, la station Metabief a pris l’initiative de ne pas attendre. En cohérence avec les projections climatiques, la station a fait le choix d’envisager la fin du ski alpin à l’horizon 2030-2035 et d’investir dans la diversification de ses activités (VTT, trail, etc.).
Quant aux skieurs, il est possible d’agir à son échelle en adoptant des habitudes plus respectueuses de l’environnement. Alors, certes, le ski totalement écologique n’existe pas encore, mais en repensant notre manière de glisser, on peut déjà rendre cette pratique moins polluante et plus en accord avec les enjeux climatiques actuels. À nous d’écrire la suite de l’histoire !
¹https://utopies.com/publications/etude-quelle-empreinte-carbone-pour-une-journee-au-ski/
²https://cpepesc.org/wp-content/uploads/2020/06/LE37_Neigeartificielle-1.pdf
³https://groupe-ecomedia.com/infographie-le-bilan-carbone-des-stations-de-ski/
⁴https://www.montagnes-magazine.com/actus-faune-sauvage-skier-sans-deranger
⁵http://www.grec-sud.fr/article-cahier/articles-du-cahier-montagne/la-biodiversite-en-montagne-menacee/
⁶https://fr.statista.com/infographie/29060/part-des-pistes-stations-de-ski-ayant-recours-canons-neige-artificielle-par-pays-alpes/
⁷https://www.francetvinfo.fr/replay-radio/au-fil-de-l-eau/la-neige-artificielle-est-elle-une-menace-pour-les-ressources-d-eau-potable_4868847.html
⁸https://www.statistiques.developpement-durable.gouv.fr/sites/default/files/2019-03/datalab-essentiel-168-eau-stations-ski-mars2019.pdf
⁹https://agirpourlatransition.ademe.fr/particuliers/conso/vacances/vacances-a-montagne-plus-ecologiques-plus-economiques