Anthropocène, Holocène, qu’est-ce que ça veut dire ?

L'échelle de temps en géologie est simple, un éon contient une ère qui contient des périodes qui contiennent, elles-mêmes, des époques (c’est un peu le système des poupées russes).

Notre éon (Phanérozoïque) a ainsi commencé il y a 541 millions d’années. Notre ère (Cénozoïque) a, elle, commencé il y a 66 millions d’années (avec l’extinction des dinosaures). La période (Quaternaire) a commencé il y a plus de 2,5 millions d’années. L'époque (Holocène), elle, a démarré il y a “à peine” 12 000 ans.

Les géologues creusent la roche pour y voir les différentes strates qui illustrent le temps qui passe. La roche, comme tout autre élément, peut s’éroder ou s’agglutiner. Différentes couches de roches se constituent, au fil du temps, en fonction de la température, de la pression et d’autres facteurs survenant sur terre. 

Dans ces couches de roches, les géologues peuvent distinguer les passages d’une époque géologique à une autre. Souvent, c’est un événement majeur à l’échelle de la planète qui la transforme et modifie la roche avec elle. Le passage entre deux intervalles de temps géologiques est alors visible sur les couches de roches et symbolisé par un clou d’or. Voilà l’art de la stratigraphie !

Les scientifiques se mettent ensuite d’accord sur ce clou d’or et s’il est ratifié par l'Union Internationale des Sciences Géologiques, il est alors officiel !

La disparition des dinosaures avec un changement radical de climat sur terre en est un exemple. Les géologues peuvent littéralement voir cette bascule dans la roche creusée et ainsi tenter de comprendre ce qu’il s’est passé, mais surtout quand cela s’est passé.

On sait maintenant que l'époque géologique dans laquelle nous vivons est l’époque Holocène. Mais comment cela est-il décidé ?Au-delà de ces industries aussi bien que dans le fonctionnement de nos sociétés, de nouveaux secteurs pointent le bout de leur nez. On peut notamment citer la production d'électricité grâce aux énergies océaniques renouvelables (vagues, courants) ou le dessalement de l’eau de mer qui permet d'autres usages industriels.

Tout d’abord, la différence est dans le climat. Il y a 11 500 ans, la température moyenne à la surface de la planète s’est adoucie. Cela a fait fondre les calottes glaciaires qui recouvraient alors près d’un quart des terres. La fin du dernier âge de glace (bonjour Manny, Sid et Diego) marque donc le début de notre époque géologique contemporaine.

Ce réchauffement a provoqué toutes les conséquences que l’on connaît aujourd'hui, mais à une autre échelle, la planète étant presque gelée à l’époque. Ainsi les forêts froides comme la toundra laissent place à une densité de végétaux supérieure à mesure que la température augmente. Avec la fonte des calottes glaciaires, le niveau des mers et des océans monte (de plus de 100 mètres selon les estimations des scientifiques). Certains espaces gelés deviennent des plaines, tandis que d’autres terres bien reliées aux continents sont transformées en îles avec la montée des eaux.

Bien entendu, ce changement dans la configuration même de la planète influe sur tous ses habitants. Les zones tropicales deviennent des forêts géantes, les déserts deviennent des savanes. Les animaux changent donc de biomes pour s’adapter à ces nouveaux espaces. Les hommes, qui, déjà, les chassent pour manger et s’habiller, suivent le mouvement.

Ces modifications apportent donc des migrations massives, des transformations dans les comportements, mais aussi des extinctions. C’est à cette époque que les mammouths, ours des cavernes et autres tigres à dent de sabre disparaissent de la surface de la planète.

Durant cette période, l’humanité est passée des outils en pierre aux outils en bronze, puis en fer, pour finir par l’acier et nos machines sophistiquées. Plus encore, la planète a connu un bouleversement certain de par les activités humaines qui ont conduit au dérèglement climatique et à ses conséquences ou au développement des industries, agissant ainsi directement sur le minéral, le végétal et le règne animal de notre planète. 

Face à ce constat, certains scientifiques font entrer l’humanité dans une autre époque : l’Anthropocène.

La question chez les scientifiques est donc celle-ci : l’être humain a-t-il fait changer la planète d’époque géologique de par sa simple présence terrestre ?

Le terme Anthropocène est utilisé depuis longtemps mais ce sont deux scientifiques, Paul Josef Crutzen et Eugene Stoermer, qui ont popularisé ce terme. Pour eux, cette nouvelle époque géologique commence avec la révolution industrielle dans les années 1800. 

Cette date, controversée, est au cœur des polémiques scientifiques autour de cette nouvelle époque.

Il existe plusieurs hypothèses concernant le début de cette époque géologique.

Avec pour racine grecque anthropo (être humain) la principale cause de l’Anthropocène est comme le fromage Port-Salut, c’est écrit dessus !

L’être humain est donc la cause de cette nouvelle époque géologique qui traverse cette simple science. En effet, comme nous l’avons vu précédemment, quand une période géologique change, c’est toute la planète qui se transforme.

Si la cause est connue, les conséquences sont, elles, de plus en plus documentées par les recherches scientifiques.

L’Anthropocène se distingue par une accélération d’une crise biologique à l’échelle mondiale.

Les biomes sont abîmés, la biodiversité est en chute libre, les habitats naturels sont détruits de manière systémique, la déforestation et les incendies détruisent les végétaux et leurs habitats, et tous ces phénomènes catastrophiques entraînent l’introduction d’espèces nocives ou invasives dans un écosystème étranger (les tortues de Californie en sont un parfait exemple). La gestion restauratoire illustre parfaitement cette notion de destruction. Après le passage de l’humanité, il faut littéralement restaurer les milieux.

La prise de conscience de l’humanité comme espèce parasite qui détruit son hôte peut aussi être un changement de perspective lié à cette nouvelle époque.

Avec l’émergence des villes ou des autoroutes, les écosystèmes ne sont plus interconnectés. L'agriculture intensive, la surpêche ou encore le braconnage contribuent à l'affaiblissement des ressources mondiales.

Plus encore, les découvertes scientifiques comme la radioactivité ou la machine à explosion ont eu un impact majeur sur la pollution. Ainsi, les accidents de Tchernobyl comme l’exploitation du pétrole à outrance créent des pollutions mesurables à l'échelle mondiale. Les émissions de CO₂ ou autres gaz à effet de serre font partie de cette influence de l'humanité sur l’état de la planète.

Parmi les critiques de ce concept, on retrouve certains climato-sceptiques, mais aussi des scientifiques sérieux.

Une partie des géologues affirme que l’écart entre les époques (qui se compte en millions d’années normalement) illustre que ce changement au bout de quelques millénaires à peine est bien plus de nature historique que géologique selon l’échelle des temps géologiques.

Le fait politique est clair : seule une partie du monde est responsable de ce changement d’époque. Quand on sait que les pays les plus riches ont pollué pendant des siècles à un rythme effréné, et ce sur toute la planète (la question de l’exploitation comme de la colonisation entre alors dans les facteurs à analyser), certains historiens comme Christophe Bonneuil et Jean-Baptiste Fressoz préfèrent alors le terme de “Capitalocène”, qui impute à un système politique la responsabilité de ce changement d'époque géologique. 

Ainsi, les chercheurs démontrent que si l’humanité a multiplié sa population par 6 entre l’an 1800 et 2000, la consommation d'énergie a, elle, été multipliée par 40 dans le même temps.

Le géologue polonais Jan Zalasiewicz déclarait que l’impact de l’activité humaine sur la géologie de notre planète serait encore visible dans des millions d’années. De quoi appuyer ce concept d’époque Anthropocène. Cependant, en 2012 comme en 2016, le congrès de l'Union Internationale des Sciences Géologiques n’a pas officiellement accepté le terme “Anthropocène”. 

La faute à un concept trop anthropomorphe pour certains, et surtout à une surexposition de la part des médias qui ne lui aura pas du tout servi. Comme si l’effet Streisand marchait aussi dans l'autre sens !