C’est un article du quotidien Les Echos qui a fait grand bruit. Le journal affirme que le gouvernement envisagerait d'augmenter certaines taxes sur l'électricité pour renflouer les caisses de l'État.
C’est en effet 60 milliards d'euros que le gouvernement Barnier s’est engagé à trouver d’ici 2025 pour “redresser la barre des comptes publics”. Si une taxe sur les super-profits des énergéticiens avait, un temps, été mis sur la table, il semblerait que les postes qui se dessinent ne soient pas de la même augure, touchant toutes les factures des Français-es.
Alors, quelles sont ces augmentations de taxes éventuelles ? C’est ce que nous allons voir ensemble !
20 octobre 2024 à 10:34
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En résumé
La Taxe Intérieure sur la Consommation Finale d'Electricité est une taxe que l’on mesure en euros par mégawattheure. En l’augmentant plus que prévu (oui, elle devait déjà augmenter, on en parle juste après), cela pourrait se faire ressentir sur les factures d'électricité.
La TICFE est l’héritière d’une longue série de taxes introduites dans les années 2000 pour financer la transition écologique et l'entrée vers une nouvelle ère énergétique qui favorise les énergies renouvelables.
Quand elle remplace l’accise sur l'électricité en 2004, elle est à 4,50 € par mégawattheure.
Elle augmente au fur et à mesure des années (9 €/MWh en 2012, 16 € euros en 2014, 19 € en 2015) pour atteindre plus de 22 € en 2016.
A l’époque, on justifie ces hausses par les investissements consentis dans les filières d’énergies renouvelables.
Les objectifs de la France comme de l’Europe sont en effet très ambitieux, avec une neutralité carbone visée d’ici 2050 et une prolifération des voitures électriques et, donc, une consommation accrue de ce type d’énergie.
Avec la guerre en Ukraine, la crise financière, qui en découle, change la donne. Pour amortir les pertes des ménages qui paient une augmentation importante, la TICFE est réduite à 1 € par mégawattheure pour les particuliers et 0,50 € pour les entreprises en début d’année 2022, les niveaux les plus bas admis par la législation européenne.
🚱 Cette diminution drastique assèche donc cette source de revenus et ce ne sont pas loin de 20 milliards d’euros qui ne rentrent pas dans les caisses de l'État.
Deux ans plus tard, en 2024, la crise énergétique étant derrière pour l'Europe, les prix redescendent enfin. Le gouvernement annonce alors le rétablissement de la TICFE à un prix de 21 € par mégawattheure. Dans le même temps, et face aux perspectives optimistes concernant le marché de l’énergie, le gouvernement annonce l'augmentation de cette taxe à 32 € par mégawattheure, son niveau d’avant la crise.
Une grosse augmentation donc, qui va toutefois passer inaperçue selon Bercy car le coût sera couvert par la diminution importante du prix du kWh sur le marché européen de l'énergie.
📸 Le scoop du journal Les Echos, c’est qu’une augmentation encore plus importante est sur la table et pourrait donc avoir lieu.
L'augmentation au-delà des 32 € annoncés ?
Selon le Projet de Loi Finance pour 2025, la taxe pourrait s'établir entre 30.09€ et 50.09€ par MWh (Article 7 du PLF présenté le jeudi 10/10/24 en conseil des ministres)
Selon le journal, cette augmentation pourrait rapporter 6 milliards d'euros sur l'enveloppe de 60 milliards recherchés.
La TICFE concernant tous les contrats, elle se répercute donc forcément sur la facture d'électricité.
Qu’il s’agisse de contrats aux prix réglementés (la baisse prévue par la CRE sera moins importante sur la taxe et plus élevée que les prévisions déclarées par le ministère) ou des contrats aux prix du marché, la facture augmentera.
Comme les prix du kWh ont beaucoup diminué, la réduction sera donc moindre (si on prend le tarif élevé de l’année dernière par exemple). Toutefois, à la moindre augmentation des tarifs, cette taxe pourrait alors peser dans le budget des Français-es.
Le problème de l’augmentation d’une telle taxe est qu’elle contrevient aux objectifs long terme du pays. En effet, rapportée aux émissions de CO2 qu'elle génère, l'électricité est bien plus taxée que les énergies issues de ressources fossiles comme l’essence, le charbon ou le gaz naturel.
🛢️ Avec cette augmentation potentielle, l'électricité serait entre 7 et 12 fois plus taxée que le gaz naturel (en fonction des valeurs qui seront retenues), si on rapporte cela aux émissions de dioxyde de carbone. Rien que ça.
Cette taxe sur une énergie qui peut-être propre interroge les experts de la transition énergétique.
Alors même que les énergies fossiles sont montrées du doigt, au profit des énergies renouvelables, alourdir les taxes de l'électricité sonne comme à contre-temps. En effet, les énergies renouvelables produisent en grande partie de l'électricité (le biogaz produit du gaz). Le choix d'opérer un virage vers la voiture électrique est un signe que cette énergie est encore là pour longtemps puisqu’elle peut être verte.
Taxer une ressource qui représente l’avenir de l’Europe, vantée par les politiques eux-mêmes (on peut notamment citer l'interdiction des voitures à moteur thermique neuves d'ici 2035), est donc un frein donné par ceux-là même qui, publiquement, soutiennent la transition énergétique et l'essor des énergies renouvelables dans nos sociétés.
🤷 Face à cette contradiction, les consommateurs-ices risquent d’être perdus-es ! On demande une transition vers des appareils qui consomment de l'électricité en priorité, afin de diminuer nos émissions de gaz à effet de serre avec des énergies polluantes et dangereuses pour la santé et les écosystèmes, tout en taxant cette énergie bien plus fortement que les énergies fossiles.
Plus encore l'uniformisation de la TVA à 20% et la suppression du taux réduit : aujourd'hui à 5,5% pour l’abonnement et à 20% pour la consommation va peser sur les fournisseurs d’énergies et donc se faire ressentir sur les factures. Cette augmentation de la facture d'électricité pourrait ensuite se répercuter le plus durement sur les précaires et les habitations mal isolées qui consomment donc beaucoup d'énergie pour se chauffer.
Les entreprises ne seraient pas non plus à la fête avec des coûts supplémentaires dans un moment où, pourtant, les prix sur le marché de l’énergie ont diminué.
Selon un article de Guillaume Jacquot pour Public Sénat, cette incompréhension est déjà partagée par l’ancien rapporteur de la commission d’enquête sénatoriale sur le prix de l'électricité. Ses préconisations allaient en effet dans le sens inverse avec un prix de la TICFE ramené à 9,50 € par mégawattheure pour les volumes de consommation de première nécessité.
Les voix dissonantes s’élèvent même au sein du gouvernement, sans compter les oppositions.
Ces textes seront discutés et probablement vivement, attendons donc le verdict, car, pour le moment, rien n'est encore fait !
https://www.lesechos.fr/economie-france/budget-fiscalite/exclusif-le-gouvernement-veut-doubler-la-taxe-sur-lelectricite-en-2025-2123972
https://www.collectivites-locales.gouv.fr/finances-locales/taxe-interieure-sur-la-consommation-finale-delectricite
https://www.publicsenat.fr/actualites/economie/electricite-la-piste-explosive-dune-hausse-des-taxes-plus-importante-que-prevu