La gestion restauratoire n’est pas une manière d’optimiser un restaurant, non. C’est une manière d’agir sur des milieux plus ou moins détériorés par l'activité humaine ou des catastrophes naturelles. Depuis plusieurs années, l'humanité cherche à réparer les dégâts faits à son environnement et à diminuer ses émissions de gaz à effet de serre, et la gestion restauratoire est une de ses armes les plus précieuses dans ce combat. Allons donc fouiller sous les routes, les forêts endommagées et les océans pour découvrir les méthodes et les limites de la gestion restauratoire. 😉
5 avril 2023
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La gestion restauratoire est une manière d’envisager l'écologie en agissant de manière directe ou indirecte sur un milieu transformé par l'activité humaine pour y restaurer un bon état écologique et de la biodiversité en tentant de rester au plus près de la résilience écologique naturelle des systèmes.
En somme, la gestion restauratoire tente de faire revenir les écosystèmes à un état totalement dénué d’altération extérieure.
Elle est donc liée au génie écologique et à la manière dont les techniques humaines peuvent influer sur la restauration des écosystèmes. Pour cela, les scientifiques ont mis en place des protocoles et des moyens pour rétablir les milieux naturels. Pour autant, face à des dégâts trop élevés, l’écosystème ne peut pas être reconstitué intégralement. Trois catégories séparent donc les approches pour tenter d’influer sur l’écosystème en l’absence de Captain Planet. (Mais si, ce super-héros bleu avec sa coupe mulet invoqué par des adolescents munis de bagues magiques).
Le cas le plus idyllique qui peut faire face au génie écologique. Dans la restauration, l’objectif est de faire revenir l'écosystème à son état initial avant sa détérioration. De façon volontaire, les ingénieurs spécialisés dans la restauration des écosystèmes vont accélérer le processus de renaturation.
La renaturation est le concept qui décrit la façon dont la nature reprend ses droits après un changement. Une forêt qui repousse après un incendie, les insectes qui reviennent, les vers de terre qui oxygènent l’air, tout ce processus fait partie de la renaturation de ce milieu.
La restauration vise donc un retour à l’état naturel du lieu, avant toute intervention extérieure et à sa continuité sans l’aide humaine. Mettre la main de l’humanité dans la terre pour mieux l’effacer dans la nature, voilà l’objectif de la restauration. Un joli paradoxe !
La réhabilitation est un mode employé en cas de lourd dégât sur l’écosystème. L'objectif ici n'est pas la réintroduction complète de la biodiversité ni la restauration complète de l’écosystème.
La réhabilitation tente d'améliorer ou de rétablir d’anciennes structures ou interactions propres à l'écosystème, sans compter sur une reconstitution totale. Si l’état d’une forêt brûlée est jugé trop détérioré pour envisager une restauration, pouvoir faire pousser le même nombre d’arbres au mètre carré ou garantir la même capacité de stockage de CO2 pour cette parcelle serait une réhabilitation réussie.
Face à nos bêtises, il faut parfois faire un choix, la réhabilitation est là pour ça. 😅
La réaffectation est le troisième stade de la gestion restauratoire. Si le milieu est trop abimé, ou déjà urbanisé, rendant une restauration vers le milieu d'origine, voire une réhabilitation des sols, par exemple, impossible, alors la réaffectation tente de “végétaliser” un espace sans tenter de revenir à l’ancien écosystème. Transformer un parking en un parc végétalisé est un exemple de réaffectation des écosystèmes, alors que convertir un champ en un parc végétalisé n’en est pas un.
La gestion restauratoire ne peut qu’aller dans le sens d'une végétalisation ou d’une amélioration de la biodiversité d’un milieu.
Il est vrai que tous ces concepts peuvent paraître un peu flous. Pour autant, les exemples en matière de gestion restauratoire des milieux et des écosystèmes ne manquent pas.
La gestion restauratoire des forêts inclut aussi bien le fait de faire repousser des arbres que d'en brûler (à ce propos, saviez-vous que les cendres sont recyclables ?) afin de créer une clairière qui était présente avant l’invasion de mauvaises plantes extérieures ou une exploitation humaine de cette parcelle (et on ne parle pas des cercles de culture, ces constructions géométriques que l‘on attribue parfois aux extra-terrestres.). Il peut aussi parfois être possible de couper des arbres pour faire revenir des espèces qui se nourrissent du bois mort. Le moyen de prendre soin des forêts ne correspond pas forcément à ce que nous croyons. Comme lorsque l’on a appris qu'un slip pouvait mesurer la qualité des sols. 😉
La gestion des sols agricoles peut passer par la mise en place de zones tampons entre les différentes parcelles afin de garantir une certaine continuité des interactions entre les différents écosystèmes ou encore de laisser la terre se reposer, recréer des cours d'eau pour nourrir la terre, etc. L'agriculture biologique produit des aliments avec une empreinte carbone moins élevée que la moyenne. Favoriser ce mode d'agriculture est donc bénéfique pour la santé des individus comme des sols.
La gestion restauratoire est aussi en première ligne pour tenter de compenser les dommages de l’activité humaine sur la nature. C’est ainsi que les ingénieurs écologiques doivent travailler sur les moyens de minimiser les dégradations causées par la construction d’une route, d’un barrage, de canaux et autres infrastructures humaines, au-delà même de l'utilisation de ces infrastructures comme la pollution des voitures à essence pour une route par exemple.
La fragmentation est un concept écologique qui tente d’expliquer comment l’activité humaine divise les biomes et les écosystèmes et interrompt leurs interactions naturelles. Tout l'objectif de la gestion restauratoire dans ce domaine est d’effacer cette fragmentation afin de créer des biomes imbriqués les uns dans les autres, formant un écosystème relié et complet.
Avez-vous déjà tenté de coller deux aimants ensemble ? Ils se repoussent. L’activité humaine est ce champ magnétique qui éloigne des pièces qui devraient pourtant parfaitement s'imbriquer.
Voilà sans aucun doute l’activité la plus connue de la gestion restauratoire. Nous avons tous-tes vu les eaux humides, des animaux soignés par des hommes et qui retournent dans leurs habitats naturels. Et bien c’est ici tout le principe.
Les animaux peuvent même devenir des auxiliaires de la restauration en jouant un rôle actif dans la reprise de la vie d'un milieu. Introduire des castors dans un environnement marécageux, humide et dévasté peut aider. Ces constructeurs de la nature feront en effet le ménage parmi les bois morts et permettront de dégager l’espace pour permettre la régénération d’autres formes de vie.
Dans d’autres cas plus rares, il est même question de remplacer des animaux disparus afin de tenter de recréer un milieu antérieur. L’exemple le plus connu (et le plus drôle) est sans aucun doute le projet d’introduction des éléphants africains en Amérique afin de remplacer le mammouth. Voilà un bon scénario pour le prochain Âge de Glace ! 😉
Si cette science est encore relativement nouvelle, elle a prouvé son efficacité. Une étude intitulée Enhancement of Biodiversity and Ecosystem Services by Ecological Restoration : A Meta-Analysis a ainsi déterminé en comparant plusieurs dizaines d'études menées sur des espaces de gestion restauratoire que cette approche améliore sensiblement leur état écologique. Ainsi, la biodiversité a augmenté de 44% en moyenne, et la bonne santé de l'écosystème de 25%.
Si ces chiffres sont encourageants, aucun milieu en gestion restauratoire n’atteint le niveau d’un milieu naturel en termes de biodiversité et de santé.
Quelles que soient nos techniques et leurs bienfaits sur la nature, la gestion restauratoire ne peut pas effacer complètement les nuisances occasionnées par les activités humaines énergivores. Si cette approche est souhaitable et tend à se développer dans le futur, elle prouve que la meilleure des gestions est de transformer le moins possible les milieux naturels afin de préserver leurs richesses.