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Coup de tonnerre sur le marché de l’énergie hexagonal : la Commission de régulation de l’énergie (CRE) a pris la décision de reporter la revalorisation d'une des composantes de la facture des client·e·s abonné·e·s au tarif réglementé d’EDF (TRV) à février. Pour justifier cette décision, l’organisme précise qu’à la date du report en question, les cours de l'électricité devraient fortement baisser, permettant ainsi aux ménages au TRV de bénéficier, malgré la hausse du tarif réseau (TURPE), d’une baisse de leur facture d’« au moins 10 % ». Si les marchés de l’électricité n’avaient pas baissé depuis janvier 2024, le tour de passe-passe du Gouvernement permettant d’aboutir à une baisse du TRVE malgré une hausse du TURPE, serait simplement impossible. Du côté des offres de marché, plus compétitives que le tarif réglementé - ou tarif Bleu - depuis un an, qu’en est-il ? Et cette baisse du TRV a-t-elle un sens en comparaison avec les tarifs de marché ? On vous explique !
30 septembre 2024 à 18:00
·Mise à jour le 26 novembre 2024 à 15:31
Lecture 6 mn
Le TURPE, ou Tarif d’Utilisation des Réseaux Publics d’Électricité, est un mécanisme de tarification français qui fixe le coût d'accès aux réseaux de transport et de distribution de l'électricité. Ce tarif est payé par les consommateur·ice·s finaux, que ce soit des particuliers ou des entreprises, et permet de financer les infrastructures nécessaires au transport et à la distribution de l’électricité à travers le pays. Grosso modo, , le TURPE, c’est ce qui permet d’entretenir les infrastructures qui nous permettent de profiter de l’électricité au quotidien. Ce fameux TURPE a deux objectifs principaux :
Le montant du TURPE est proposé par la Commission de Régulation de l'Énergie (CRE) et est régulièrement révisé. Son calcul est complexe et prend en compte plusieurs éléments, comme le coût des infrastructures, les pertes en ligne (lorsque l’électricité est transportée sur de longues distances, il y a des pertes d’énergie, qui sont incluses dans le TURPE pour compenser les coûts supplémentaires associés), les paliers tarifaires, etc.
En la matière, pas d’injustice, puisque tous·tes les consommateur·ice·s d’électricité, qu’ils soient particuliers ou entreprises, paient le TURPE via leur facture d’électricité. Il constitue une partie des coûts fixes intégrés dans les factures, en plus du coût de l’énergie elle-même. Le montant exact dépend de la consommation d’électricité, de la puissance du compteur et du type de raccordement.
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Le TURPE joue également un rôle clé dans la transition énergétique ! Pour commencer, il incite au bon usage des réseaux et finance leur modernisation. Par exemple, pour l’adaptation du réseau aux énergies renouvelables décentralisées (comme les éoliennes et les panneaux solaires), la digitalisation et la flexibilisation des réseaux.
En somme, le TURPE est une composante essentielle du système électrique français, qui garantit le financement durable des réseaux et contribue à l’équilibre entre l’offre, la demande et les investissements nécessaires pour soutenir la transition énergétique.
💡 À savoir
Le TURPE est révisé environ tous les quatre ans. À chaque nouvelle période tarifaire, hop, une nouvelle “période” (cadre tarifaire) du TURPE est mise en place pour ajuster les coûts en fonction des besoins du réseau et des objectifs de la politique énergétique française. Actuellement, la période en vigueur est le TURPE 6, qui est entrée en application en 2021 et est prévue jusqu’en 2025.
L’année 2024 devait être l’année de la mise à jour du TURPE. En effet, la hausse, liée à une revalorisation de 4,8 % du « tarif réseau », était initialement prévue au 1ᵉʳ août. Cependant, c’était sans compter la récente annonce du gendarme de l’énergie dans un communiqué en date du 11 septembre 2024 :
« L’actualisation annuelle du tarif d’utilisation des réseaux publics d’électricité (TURPE) aura lieu le 1ᵉʳ novembre 2024. Cette actualisation ne sera pas répercutée sur les consommateurs, ménages et TPE aux tarifs réglementés de vente de l’électricité (contrats TRVE ou indexés TRVE). Dans un objectif de stabilité et de lisibilité des prix pour le consommateur, la CRE propose que la prochaine évolution des TRVE ait lieu selon le calendrier habituel, au 1er février 2025. Sur la base des prévisions de prix et de fiscalité actuelles, et intégrant l’actualisation du TURPE, la CRE anticipe une baisse des TRVE d’au moins 10 % au 1ᵉʳ février 2025. »
En substance, qu’est-ce que cela signifie pour les factures des Français·ses ? L'augmentation du tarif réseau, lié aux différents coûts d'acheminement de l'électricité, sera en fait appliquée seulement à partir du 1ᵉʳ février 2025 pour les TRV, alors qu’elle s’applique aux tarifs de marché depuis le 1er novembre 2024. Ce traitement différencié selon que le consommateur est au TR ou au tarif de marché est assez surprenant.
Pour les abonnés au tarif bleu d'EDF (tarif réglementé), cette hausse, qui représente une augmentation de 1 % sur la facture sera alors absorbée par le repli attendu des cours de l'électricité. Au bout du compte, les ménages concernés pourraient donc bien bénéficier d'une baisse de leur facture d'environ 9 %, si l’on tient compte des prévisions à la baisse du marché.
Pourquoi un tel revirement de la CRE ? Cette augmentation prévue de longue date pour août 2024 était pour le moins, attendue, le gouvernement démissionnaire avait renoncé à l'appliquer, afin d'éviter un effet yo-yo des prix pour les consommateur·ice·s, déjà éprouvé·e·s par les différentes évolutions tarifaires de ces dernières années. Sur deux ans, les prix de l'électricité ont bondi de plus de 43 %, et ce, malgré le bouclier tarifaire instauré par l'État. Le gouvernement avait donc demandé à la CRE de rendre une nouvelle délibération, afin de mieux tenir compte de ses recommandations de stabilité. Magnanime, le gendarme a décidé de maintenir l’actualisation du TURPE, mais pour une entrée en vigueur au 1ᵉʳ novembre.
Pour rendre tout cela plus digeste en apparence et seulement pour les ménages et TPE aux tarifs réglementés de vente de l'électricité (TRVE) (soit 22,4 millions de compteurs), la CRE propose de reporter cette hausse du TURPE au 1ᵉʳ février, date de révision habituelle du TRVE.
Bon à savoir
Pour résumer, l’objectif est de rendre ce boom des prix plus tolérable pour les consommateurs ayant opté pour le TRVe et n’ayant par conséquent pas bénéficié de la baisse des prix du marché de l’électricité, grâce au recul des cours de l'électricité qui entrent dans le calcul de la facture. Néanmoins, il ne faut pas confondre report et disparition. Une hausse des prix aura bel et bien lieu sur le fameux TRVe ! Sous une apparente « protection » des consommateur·ice·s, la démarche consiste finalement à opter pour la technique du « reculer pour mieux sauter ».
Si, de prime abord, ce report semble pour le moins avantageux pour les consommateur·ice·s - c’est en tout cas la position de la CRE sur le sujet - à y regarder de plus près, il y a comme qui dirait un hic. Si on récapitule, la CRE a décidé de maintenir la hausse des tarifs d’utilisation des réseaux à compter du 1ᵉʳ novembre 2024, avec une décision de report qui ne concerne QUE les TRVE. Eh oui, du côté des offres de marché, point de report. Toutes devront se plier à l’augmentation. Favoritisme, direz-vous peut-être ? Au-delà de cela, cette décision est très probablement… Contraire au droit !
Si l’on se réfère à l’article R337-22 du Code de l’énergie, il est prévu que « toute évolution du prix de l’accès régulé à l’électricité nucléaire historique ou des tarifs d’utilisation des réseaux publics d’électricité donne lieu à la modification des tarifs réglementés de vente en vigueur pour prendre en compte cette évolution. Toute décision motivée de la Commission de régulation de l’énergie concernant une évolution des tarifs d’utilisation des réseaux publics d’électricité est accompagnée d’une proposition de nouveaux tarifs réglementés de vente de l’électricité. »
De même, la Directive électricité de 2019 prévoit que les TRVE doivent être établis
« à un prix supérieur aux coûts, à un niveau permettant une concurrence tarifaire
effective. »
Grosso modo, et pour faire simple : augmentation du TURPE = augmentation du TRVE. Par ailleurs, pour l’Association Nationale des Opérateurs Détaillants en Énergie (ANODE), il est essentiel de rappeler que de nombreux fournisseurs proposent actuellement des offres bien plus compétitives, et parfois plus protectrices que les TRVE. À en croire l’association, « la meilleure façon de protéger l’ensemble des consommateurs français, et pas seulement ceux bénéficiant des TRVE, aurait été de repousser l’augmentation du TURPE au 1ᵉʳ février 2025. Les gestionnaires de réseaux, en tant qu’opérateurs régulés, auraient pu couvrir leurs coûts, y compris l’impact sur leur trésorerie. En revanche, la décision d’avancer la hausse du TURPE au 1ᵉʳ novembre met en difficulté les fournisseurs alternatifs, qui devront assumer cette augmentation sur leur trésorerie jusqu’au 1er février 2025, sans garantie de pouvoir répercuter ce surcoût en raison de la variabilité de leur portefeuille clients ».
Finalement, ce report de l’augmentation du TURPE présente un effet trompe-l’œil de “baisse” pour le tarif réglementé, qui subit en réalité une hausse des taxes et tarifs de réseaux, tandis qu’elle frappe les utilisateurs au tarif de marché d’une hausse pure et simple puisque ces tarifs étaient déjà les plus bas. Pour autant, les fournisseurs continueront de proposer des offres aussi avantageuses que possible et les offres de marché resteront compétitives face au TRVE. et . Comme dirait quelqu’un, « les calculs sont pas bons Kevin ! »
Si on la fait courte : le TURPE augmente bel et bien en novembre (plutôt qu’en août), cependant, cette hausse ne sera effective qu’en février pour le tarif réglementé. Reste à savoir une chose essentielle : que va-t-il se passer pour les client·e·s bénéficiant d’une offre de marché auprès d’un fournisseur alternatif ?
En ce qui les concerne, la hausse a bien eu lieu dès novembre. Donc, quatre mois avant. Cependant, pas d’inquiétude. Ce retard dans l’application de la hausse du TURPE sera rattrapé par une régularisation lissée sur plusieurs mois pour les TRVE. Tous les utilisateurs du réseau électrique auront in fine contribué au même niveau à la hausse du TURPE; il s’agit en somme juste d’un échéancier différent appliqué aux TRVE par rapport aux offres de marché.
Par ailleurs, un rapide détour du côté des comparateurs en ligne - comme celui de Selectra ou du médiateur national de l’énergie - nous permet de constater que les offres de marché sont en moyenne 15 à 20 % moins chères que le tarif réglementé depuis quasiment un an. Une différence qui absorbe largement la hausse et permet de conserver la compétitivité de ces offres. Elles aussi devraient profiter assez immédiatement de futures accalmies des marchés. Autrement dit, la bonne nouvelle, c’est que l’offre d’électricité 100 % verte d’Ekwateur restera toujours bien moins couteuse que le tarif Bleu d’EDF ! Elle est pas belle, la vie ?
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