Si la France tient à honorer ses promesses de neutralité carbone en 2050, elle devra sans aucun doute augmenter la part du renouvelable dans son mix énergétique. C’est que, pour le moment, le pays est en retard, comme le démontre notre excellent article sur le sujet. Et le temps presse.
Le 12 septembre 2023, les eurodéputés ont adopté une loi exigeant un taux d’au moins 42,5 % (le nombre est très précis) d'énergies renouvelables dans la consommation énergétique européenne. Face à cette nécessité, les technologies liées aux énergies renouvelables évoluent et les solutions se multiplient. De quelle manière l'Hexagone peut-il augmenter la production d'énergies renouvelables dans sa consommation globale, et dans quelle proportion ?
Partons ensemble à la découverte des moyens pour augmenter réellement la part des énergies renouvelables dans le mix énergétique français.
17 octobre 2023 à 11:11
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En résumé
Quels que soient les scénarios envisagés par le rapport “Futurs énergétiques 2050” de l’entreprise RTE, les énergies renouvelables devront être fortement développées pour atteindre l’objectif de la neutralité carbone en 2050.
La France est en retard sur ses objectifs, que ce soit en matière d'énergie solaire et éolienne.
L'augmentation du renouvelable dans le mix énergétique français ne peut pas se faire sans une diminution drastique de la consommation d’énergie.
Le rapport “Futurs énergétiques 2050” de l’entreprise RTE commandé par l’état français met en place six scénarios différents qui pourraient permettre à la France de tenir ses objectifs en matière de neutralité carbone d'ici 2050.
Dans le scénario le moins favorable aux énergies renouvelables et qui donne la part belle aux centrales nucléaires et notamment aux nouveaux réacteurs, la production d'énergie solaire est tout de même multipliée par 7. L’éolien terrestre produit 2,5 fois plus d'électricité qu’aujourd'hui. Le parc éolien marin (qui reste à créer en France) est presque aussi productif que l’éolien terrestre avec 24 gigawatts de production annuelle.
Dans le scénario le plus propice aux énergies renouvelables, qui fait sortir la France du nucléaire à l'horizon 2050, la France a multiplié sa production d'électricité solaire par…21 ! Le parc éolien terrestre doit être augmenté par 4 et l’éolien marin doit produire 64 GW d'électricité par an contre à peine 1 seul aujourd'hui.
Quel que soit le scénario envisagé par les scientifiques qui ont rédigé le rapport, les deux extrêmes exigent tout de même une augmentation significative des énergies renouvelables dans le mix énergétique français.
La France est en retard. En 2020, elle devait avoir au moins 23% de son mix énergétique en énergies renouvelables. Ce stade est aujourd'hui à peine dépassé. L’objectif de 42,5% d’énergies renouvelables dans le mix énergétique d’ici 2030 étant un nouveau défi qu’il faut relever, il est nécessaire d'accélérer la cadence. Le futur de la première source d’énergie renouvelable, l'énergie hydraulique, n’est pas brillant, notamment à cause de la sécheresse et de la classification de nombreux cours d’eau en espaces préservés. Cependant, vu le faible développement en France des autres énergies renouvelables, on ne peut qu’envisager une augmentation significative de ces dernières.
Quoi de plus renouvelable que l’énergie du soleil ? La France possède l’un des ensoleillements les plus élevés d’Europe, pouvant permettre une large utilisation de cette ressource. Pourtant, des pays comme l’Italie ou l’Allemagne sont en avance sur le sujet. Si cela reste compréhensible pour l’Italie, savoir que l’Allemagne utilise plus l’énergie solaire que les Azuréens ou les Toulousains semble tenir de la mauvaise blague.
Avec un tel retard, il n’est pas étonnant que la France ne soit pas en mesure de respecter ses propres objectifs en matière de production d'énergie solaire. Ainsi, en 2022, elle produisait 15,8 GW par an au lieu des 19 GW promis.
Pour autant, comme le suggèrent les scénarios du rapport de la RTE, le solaire reste une des pierres angulaires du développement des énergies renouvelables. Avec 775 GW estimés, la production solaire en France peut devenir le fer de lance de la transition énergétique du pays.
Si les centrales solaires doivent donc se développer, la France mise aussi sur des filières liées à cette énergie solaire pour transformer des industries.
L’agrivoltaïsme entre dans cette optique. Le concept est simple. Installer des panneaux solaires sur des terres agricoles pour que l'énergie produite serve directement à la ferme et aux exploitants-es. Cela permettrait une économie d'énergie en évitant le transport de celle-ci tout augmentant la part des énergies renouvelables dans le mix énergétique français.
Si l’éolien terrestre est la source d'énergie qui augmente la plus rapidement en France, elle n’en reste pas moins peu développée par rapport à certains voisins.
En 2023 la France produit 21,6 GW grâce à l'éolien terrestre, ce qui représente 8 à 9% de la consommation d'énergie. Ce nombre grimpe à 55% chez le meilleur élève du continent, le Danemark, à 34% pour l'Irlande ou encore 28% pour le Royaume-Uni. Un fossé qui illustre le chemin qui reste à parcourir pour l'Hexagone.
Pour autant, différents facteurs permettent d'être optimiste sur le sujet. D’abord, la technologie est au point et le coût de fabrication et d'installation des éoliennes terrestres diminue fortement. L’ADEME évalue cette baisse des prix de production jusqu'à 36 % entre 2016 et 2030. Plus encore, les projets nationaux de parcs éoliens se multiplient et l’objectif de produire 37 GW supplémentaires d’ici 2028 grâce à l’éolien terrestre est un horizon envisageable.
La France s’engage à créer un parc éolien marin pouvant produire 40 GW par an d'ici à 2050. Cet objectif place donc la France au centre de ces deux scénarios les plus extrêmes.
Le parc éolien de Saint-Nazaire, qui fonctionne depuis 2022, est ainsi le symbole de cette volonté. Ce parc de 80 éoliennes marines produit l'équivalent de la consommation d'électricité de 700 000 personnes par an. Pour atteindre ses objectifs, l'Hexagone ne peut pas s'arrêter là et six autres projets de parcs éoliens marins vont faire ou ont déjà fait l’objet d'appels d’offres.
À terme, en 2030, ce sont 17 parcs éoliens marins qui devraient avoir vu le jour pour une production de 10 GW par an.
Si ces énergies renouvelables sont largement utilisées dans le monde, il en existe bien d’autres qui semblent laissées à l’abandon, ou presque.
Bien que le rapport souligne la nécessité d’une augmentation de toutes les énergies renouvelables, les hydroliennes ou la biomasse sont mises de côté pour ne représenter qu’une infime partie des projets en cours.
Pourtant, comme le démontre notre article sur les hydroliennes fluviales, il est possible d’envisager des milliers de petites hydroliennes fluviales pour alimenter des maisons.
À la manière de l'agrivoltaïsme, décentraliser la production d'électricité pour offrir une indépendance énergétique à une ferme, quelques maisons, ou un immeuble est tout à fait possible.
La création d’une filière récoltant tous les déchets ménagers en France pouvant être transformés en biomasse peut aussi être une voie vers un mix énergétique plus vert.
En somme, il existe des milliers de solutions. Leur choix ne dépend que de considérations budgétaires et politiques. Avec un investissement massif, il est possible d’arriver aux objectifs de 2050. Mais encore faut-il vouloir investir massivement dans ce domaine.
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Quelles que soient les solutions imaginées pour augmenter la part des énergies renouvelables dans le mix énergétique français, un paramètre reste immuable : la diminution de la consommation mondiale d'énergie.
En effet, selon tous les scénarios du rapport de la RTE, l'augmentation de la part d'énergies renouvelables dépend en grande partie de notre capacité à freiner une consommation en constante hausse depuis deux siècles. Un changement de paradigme énergétique passe donc tout autant par la transformation des moyens de production de ces énergies que par notre faculté à transformer notre façon de la consommer.
Les solutions pour augmenter la part d'énergies renouvelables dans le mix énergétique sont très nombreuses. Mais elles demandent des investissements économiques et individuels, des changements dans les industries comme dans la façon dont nous vivons. Des investissements encore trop timides si l’on en croit le GIEC. En effet, il est important de rappeler que ni la France en tant que pays, ni l’Europe en tant que continent, ne sont en phase avec les objectifs qu’ils se sont eux-mêmes fixés pour lutter contre le dérèglement climatique et ses conséquences.
https://assets.rte-france.com/prod/public/2021-06/BP50_Resume%20executif.pdf
https://www.ecologie.gouv.fr/eolien-terrestre
https://www.statistiques.developpement-durable.gouv.fr/edition-numerique/chiffres-cles-energies-renouvelables-2022/3-objectif-2030-et-situation-actuelle
https://www.gouvernement.fr/actualite/la-nouvelle-strategie-energetique-de-la-france
https://www.statistiques.developpement-durable.gouv.fr/edition-numerique/chiffres-cles-energies-renouvelables-2021/11-eolien