Le projet de loi sur l'accélération des énergies renouvelables, porté par Agnès Pannier-Runacher, ministre de la Transition écologique, a été adopté définitivement par le Sénat le 7 février 2023. Ce texte vise à développer le parc d’énergies renouvelables en France pour répondre aux objectifs de neutralité carbone.
Quelles sont les grandes mesures portées par cette nouvelle réglementation ? Enquête au cœur du parlement.
9 février 2023
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Avant d’expliquer les mesures permises par le projet de loi sur les énergies renouvelables, il convient de faire un bref état des lieux du contexte. C’est parti pour une rapide explication !
Pour respecter les engagements pris au moment de l’accord de Paris sur le climat, les pays européens se sont fixés de développer les énergies vertes par étape. Chaque pays devait remplir un objectif à horizon 2020. Tous les États membres ont rempli leurs objectifs sauf… La France ! À l’heure actuelle, les énergies renouvelables représentent 19,3 % de notre consommation finale brute d’énergie, alors que l’objectif était fixé à 23 % pour 2023. Conséquence ? Des émissions de gaz à effet de serre encore élevées et une amende salée de 500 millions d’euros. 💸
Comme le rappelle le Sénat, en matière de transition énergétique, « la France fait aujourd’hui figure de « mauvais élève » dans le déploiement des énergies renouvelables, ce qui compromet gravement notre sécurité d’approvisionnement et notre capacité à respecter nos engagements climatiques ».
Afin d’éviter un nouveau loupé, la ministre de la Transition a donc décidé de porter fin septembre 2022 un projet de loi relatif à l'accélération de la production d’énergies renouvelables.
Ce texte doit permettre à la France de faire un pas de plus vers la neutralité carbone et d’atteindre 40% d’énergies vertes dans la production d’électricité d’ici 2030.
Tout d’abord, la nouvelle loi vise à accélérer la création d’infrastructures de production d’électricité renouvelable. C’est ce qu’explique Agnès Pannier-Runacher. Selon elle, « l'enjeu de ce texte est de lever tous les verrous qui retardent le déploiement des projets, ni plus ni moins ». Il prévoit de simplifier les démarches d’implantation des centrales solaires ou éoliennes. En effet, il faut savoir qu’en France, la construction d'un parc solaire prend en moyenne 5 ans de procédures, celle d'un parc éolien 7 ans et celle d'un parc éolien en mer 10 ans. Autant vous dire que face à l’urgence climatique, ces démarches sont très longues !
Concernant la planification des zones d'accélération du déploiement des énergies renouvelables, les collectivités territoriales seront davantage sollicitées. Les élus locaux « proposent et ont le dernier mot sur le zonage », a fait savoir la ministre de la Transition écologique.
Ils pourront notamment déterminer des zones d’exclusion et devront « veiller à limiter les effets de saturation visuelle », notamment en ce qui concerne l’installation de parcs éoliens terrestres.
Autre point majeur, celui du développement de l’éolien en mer. Alors que l’éolien terrestre représente 7% de notre production d’électricité, l'éolien en mer peine à émerger. Pourtant, grâce à son importante surface maritime (la deuxième mondiale !), la France possède un potentiel important pour le déploiement de centrales éoliennes offshore (c’est-à-dire celles qui se situent loin des côtes).
Le projet de loi prévoit de regrouper les débats publics sur la localisation des parcs éoliens en mer pour accélérer leur implantation. Les zones ciblées en priorité seront celles situées dans la zone économique exclusive, à environ 22 km des côtes. Pour des raisons de protection de la biodiversité, seront exclus des zones d’implantation les parcs nationaux ayant une partie maritime.
L’énergie éolienne n’est pas la seule concernée par la loi. Elle vient aussi créer de nouvelles dispositions pour l’énergie solaire. Voyons cela de plus près.
Avec ce texte, l’expression « autoroute du Soleil » prend un tout autre sens. Tout d’abord, la loi sur l’accélération des énergies renouvelables permet de faciliter l’implantation de parcs solaires photovoltaïques le long des autoroutes. Un moyen d’utiliser ces zones souvent délaissées pour produire de l’électricité verte.
En outre, l’article 9 du projet de loi, permet d’obtenir des dérogations à la loi Littoral pour la création de fermes solaires dans des friches. Un point positif quand on sait que l’Ademe « estime le potentiel à 53 GWc, réparti à 93 % sur les zones délaissées (49 GWc) et à 7 % sur les parkings (4 GWc). »
On vient de parler des parkings. Cela tombe bien ! Eux aussi sont concernés par cette nouvelle loi. Désormais, les parkings extérieurs de plus de 1 500 m2 devront être équipés de d’ombrières photovoltaïques. Pour les entreprises, c’est l’occasion de valoriser leur foncier tout en améliorant le confort de leurs visiteurs. Si elles veulent aller plus loin que le texte en l’état, ces panneaux solaires photovoltaïques pourront être couplés à des bornes de recharges électriques pour favoriser la mobilité durable. C’est ce que l’on appelle un cercle vertueux !
👋 « Ohé, psst ». Pas besoin d’avoir 1 500 m2 de parking pour installer des panneaux photovoltaïques. Si vous souhaitez solariser votre place de stationnement, vous pouvez installer un carport solaire. Ainsi, vous pourrez produire de l’électricité en autoconsommation et réduire votre facture d’électricité. Lumineux, n’est-ce pas ?
Enfin, le texte cherche à encadrer le développement de l’agrivoltaïsme. L'agrivoltaïsme est une pratique qui consiste à créer une synergie entre l'agriculture (élevage ou culture) et la mise en place de panneaux solaires au sol. Dans ce cadre, le texte réaffirme la primauté de l’activité agricole sur l’installation des modules photovoltaïques. En outre, il impose aux installations de rester « réversibles ».
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Si le texte prend de nombreuses mesures en faveur de la production d’électricité verte, il est nettement moins bavard en ce qui concerne le développement de la chaleur renouvelable et du gaz vert.
Concernant le biogaz, l’article 16 nonies A de la loi précise que « les installations de biogaz par méthanisation produit exclusivement à partir d’effluents d’élevage bénéficient d’un régime de soutien complémentaire ». La vente de biométhane produit à base de déchets agricoles devrait donc être revalorisée.
La chaleur renouvelable brille par son absence. Comme le souligne le média spécialisé Reporterre, la loi « ne propose presque rien pour développer la production de chaleur renouvelable, qui doit pourtant doubler entre 2020 et 2030 pour atteindre les objectifs climatiques ».
Cet oubli quasi-total de la chaleur renouvelable se voit également dans la matière dont est traité le bois (ou plutôt n’est pas traité). Le bois énergie, qui représente pourtant 70% de notre chaleur renouvelable et 42,3% de notre production d’énergie renouvelable, selon le Syndicat des Énergies Renouvelables (SER), n’est mentionné nulle part dans le texte. C’est bien dommage quand l’on sait que le bois de chauffage est pourtant essentiel en matière de lutte contre le dérèglement climatique. D’après les données de l’ONF (Office National des Forêts), l’utilisation du bois bûche pour le chauffage émet 10 fois moins de dioxyde de carbone (CO2) que le fioul, une énergie fossile.
🌳 Si la loi sur les énergies renouvelables a oublié le bois, chez Ekwateur, cela fait bien longtemps qu’on a décidé de le mettre en avant. Que vous soyez plutôt branchés pellets ou bûches, nous avons ce qu’il vous faut pour vos appareils de chauffage au bois ! Prêt-e à vous chauffer durablement ?
https://www.lemonde.fr/planete/article/2022/11/24/renouvelables-la-france-devra-debourser-plusieurs-centaines-de-millions-d-euros-pour-ne-pas-avoir-atteint-ses-objectifs_6151464_3244.html
http://www.senat.fr/lessentiel/pjl21-889.pdf
http://www.senat.fr/leg/pjl22-268.html
https://bilan-electrique-2021.rte-france.com/production_totale/
https://www.francebleu.fr/infos/environnement/eolien-en-mer-solaire-ce-que-contient-la-loi-sur-les-energies-renouvelables-votee-definitivement-au-senat-3722999
https://presse.ademe.fr/2019/05/etude-limportant-potentiel-des-friches-et-des-parkings-pour-developper-lenergie-photovoltaique.html
https://reporterre.net/Bois-biomasse-Des-mesures-frileuses-pour-la-chaleur-renouvelable
https://www.onf.fr/aux-cotes-des-territoires/+/38::relever-les-grands-defis-energetiques-et-climatiques-avec-la-filiere-foret-bois.html